Réponse à une conférence de Ploum par son éditeur

La vidéo de la conférence de Ploum au Capitole du Libre est en ligne. Intitulée « Libérons la culture pour cultiver la liberté », il y annonçait pour la première fois la libération de la collection Ludomire (et donc de ses œuvres publiées chez nous). Je vous invite à la visionner (ou à la la lire) car elle est édifiante. Son visionnage m’a inspiré certaines réflexions.

Une réflexion au diapason

Tout d’abord, je vais relever mon accord de fond concernant la nécessité de libérer la culture pour sauver notre société aux prises avec les algorithmes et menacée par l’uniformisation. Je pense réellement que la propriété intellectuelle est une fraude et la principale aliénation des ressources communes. Il est évident que toute mesure visant à la limiter ou à l’interdire serait un progrès pour l’humanité. D’ailleurs, il n’y a pas besoin de l’interdire car, en réalité, il suffirait d’arrêter de la défendre pour qu’elle disparaisse d’elle-même.

Ainsi, pour moi, le choix d’une licence pour la collection Ludomire n’est qu’un décision contrainte dans le cadre légal dans lequel nous vivons. J’ai choisi la licence copyleft uniquement car elle se rapproche le plus du monde libéré de la propriété intellectuelle que j’appelle de mes vœux.

Peut-être, me demanderez-vous comment une maison d’édition sans propriété intellectuelle pourrait survivre. Et bien c’est un sujet que j’aimerais pouvoir développer à part, mais je peux vous donner les principaux ingrédients :

  • une bonne dose du lien social basé sur l’humain pour remplacer les algorithmes ;
  • une pincée de certification de l’origine intellectuelle (infalsifiable et publique) à la place des avocats/polices pour veiller au respect de la propriété intellectuelle ;
  • une bonne dose de mécénat au lieu de la rançon consumériste.

Défense du producteur de trombones

Ploum compare les entreprises à un système optimiseur de production de trombones. Il s’en prend également au marketing qui semble être la pire invention ou institution de l’humanité. Bien entendu, je partage complètement ces constats dans les exemples les plus choquants et les plus puissants d’aujourd’hui. Mais, il m’est difficile d’être aussi sévère car, dans le partage des tâches entre Ploum et PVH éditions, c’est nous qui avons les mains sales.

Tout d’abord, il est difficile de définir la frontière entre « marketing » et effort de présentation ou de promotion. Faire des communiqués formatés et soignés pour parler d’une œuvre procède avant tout d’une volonté d’efficacité. Rien que le travail graphique sur la collection Ludomire s’apparente au marketing, il a pour but de stimuler la vente, mais il participe aussi à la beauté finale d’œuvres artistiques comme Printeurs. En réalité, la communication est un métier difficile et subtil mais nécessaire. Il est essentiel même pour un petit atelier à trombones comme PVH éditions.

Car oui, PVH éditions doit faire de l’argent pour salarier ses employés, pour payer ses graphistes et illustrateurs, pour payer l’imprimeur, sans compter les autres partenaires indispensables comme le diffuseur, le distributeur et les librairies. Même si nos ambitions ne sont pas aussi démesurées que celles de Bezos ou Musk, nos contraintes sont aussi vieilles que l’humanité : la nécessité d’assurer les besoins de consommation primaire et de sécurité pour ceux qui travaillent pour nous. Et, cher Ploum, nous ne pouvons pas compter sur un revenu régulier d’une université pour y parvenir.

Cent patates ?

Comme Ploum l’a dit, les solutions pour le futur sont encore à inventer et elles proviendront probablement d’une culture libérée, de l’imagination de ses artistes sortant du cadre aliénant du copyright. Chez PVH éditions, nous voulons stimuler cette création en offrant l’opportunité d’être édité sous licence libre ou en proposant des concours de création. Mais je pense que les développements d’imaginaires libres par les artistes doivent s’accompagner d’expérimentations économiques concrètes par des entreprises comme PVH éditions pour qu’un meilleur futur puisse advenir. Et les uns et les autres doivent s’entretenir pour fleurir.

Ah, et sinon, la catastrophe du mildiou des patates, c’était en Irlande au XIXe siècle !

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